J'ai fait du potager toute ma vie en Picardie,répétant les gestes de mon père qui faisait un jardin pour 30 ou 40 personnes alors qu'ils n'étaient que deux.Il distribuait ainsi des légumes gratuitement à tous les "vieux" de la commune qui avaient toujours eu l'habitude de faire pousser leurs légumes et qui étaient devenus des amis ou plutôt des complices jardiniers mais qui avaient perdu la forme.
J'ai déjà écrit un article sur la psychothérapie du jardinier car si j'ai la conviction que la terre est notre notre mère nourricière ,je pense aussi qu'elle est notre amie,bien sûr et qu'on lui manque de respect .
Je reprends le fil de mon article: depuis que je suis en colline de Provence j'avais quelques arbres , arbustes et plantes qui ne poussaient pas ou mal.J'étais étonné car tout poussait en Picardie.Il me suffisait,le soir,après avoir étudié la météo et appris qu'il allait pleuvoir,de courir en rentrant de mes consultations vers mon havre de paix,je veux parler de mon jardin potager,pour planter comme un fou et simplement mettre en terre les plants que m'avait donné mon bon Monsieur Tassin,mon jardinier philosophe préféré,et ensuite de rentrer satisfait car plus besoin d'arrosage,la pluie faisant un travail que le robinet ne fera jamais.
Mon potager faisait ainsi environ 400 m2 et j'avais absolument tout:carottes,endives,patates mais seulement des rattes du Touquet (mon ami Monsieur Tassin se moquait de moi pour mon peu de rendement,mais que de délices quand elles rissolent dans la poêle)des poireaux par centaines car quoi de meilleur qu'une soupe poireau pommes de terre,des tomates et je suis allé jusque 64 pieds de tomates au cours d'un concours avec un copain,des échalotes,des oignions,des choux etc etc .
Quand je suis arrivé en Provence,en retraite ou pseudo retraite,je me suis mis à refaire un potager,sans me douter que le sol,fait de cailloux ,dur comme du béton ainsi que les pins qui diffusent leur acidité et le ciel bleu qui ne déverse que très rarement ses larmes (car étant en colline,je n'ai pas l'avantage des canaux d'irrigation de la plaine où se trouve le jardin de la France),et bien sans me douter que tout ceci allait m'envoyer directement au casse-pipe,c'est à dire vers une déception qui rend les bras du jardinier ballant de désolation devant une récolte si menue qu'il a l'impression d'avoir travaillé toute l'année pour rien.
Alors je me suis mis en quête de moyens pour résister et réussir quand même un potager car j'ai la tête dure,même si je ne suis pas Breton,et j'ai alors découvert la permaculture.
Le mot permaculture est un mot-valise formé de «perma» (permanent) et «culture» (agriculture), il signifie d’abord « agriculture permanente » puis « culture de la permanence ». Par «permanence» il faut comprendre ce qui s’inscrit dans un temps long et qui vise donc l’auto -suffisance alimentaire, mais aussi énergétique. Dans le modèle de la permaculture, le producteur est aussi le consommateur : il sait ce qu’il consomme puisque c’est lui qui l’a produit, par opposition à un consommateur passif qui ne sait souvent même pas d’où vient et comment a été produit la nourriture qu’il consomme.
Dans la permaculture le côté humain et social est fondamental.L’origine de ce qu’on appelle la permaculture remonte au Néolithique, aux origines de l’agriculture. C’est ce qu’on appelait le bon sens à une époque où l’humain vivait avec et grâce à la Nature sans autre énergie que celle de ses bras, de son intelligence et de la connaissance de son milieu.La permaculture, c’est mettre ses idées en pratique, vivre selon ses idées.
Je me suis donc mis à faire quelques carrés (en réalité des rectangles),j'ai décaissé la terre, sur 20 à 30 cm,j'ai rempli ce potager avec beaucoup d’autres matières végétales. Le but, c’est de créer un sol vivant et presque inépuisable pour y cultiver les futurs légumes.J'ai mis du bois en décomposition,des feuilles,des herbes sèches,des résidus de tonte,du fumier,des cartons,beaucoup de cartons,et enfin ,j'ai remis la terre décaissée. (ouf)
Comme il ne faut jamais laisser la terre à l'air,je l'ai recouverte avec des feuilles séchées et ballotées par notre cher mistral.
Tous les petits travailleurs du sol que sont les bactéries, les champignons, les vers de terre se sont mis au boulot pour décomposer le mélange qui a servi à remplir ainsi mon potager.
Ma toute première expérimentation a été pour un figuier qui passait son temps ,chaque année, à perdre ses feuilles chaque été malgré des arrosage conséquents.Les cartons,les herbes folles,les tontes,les feuilles mortes se sont décomposées et mon figuier vit une nouvelle vie avec des fruits délicieux et cela m'a incité à passer au potager avec une certaine réussite.
Il est clair que si la permaculture était pratiquée à grande échelle, cela entraînerait un certain nombre de bouleversements dans l’organisation et la division du travail. Un certain nombre de professions pourraient disparaître.Par exemple,qu’adviendrait-il des professions qui nécessitent un grand nombre d’années d’étude, comme la médecine par exemple ? mais si tout le monde appliquait les méthodes de la permaculture, on n’aurait plus de plante malade, donc on serait moins malade et on aurait peut-être moins besoin de médicaments et de médecins. En permaculture, on considère en effet que, dans notre modèle de société actuel, la plupart des végétaux et des animaux que nous consommons sont malades et sont, avec les autres types de pollution les principales causes de maladies humaines.
Pourquoi cet article , me direz-vous ? et bien parce qu'on est , à mon avis,dans une impasse agricole,dans une course aux rendements impliquant des désherbants,des engrais,et encore des désherbants,et encore des engrais (30 à 40 fois pour faire pousser une simple pomme)le tout tuant les insectes et les oiseaux et je ne donne pas cher de notre planète au long cours,comme le dit Yves Cochet qui prévoit la fin de notre société dans un maximum de 10 ans! brrrrrrrrh , ça fout la trouille.Mais comme je suis un optimiste , je pense que des solutions sont possibles et que l'homme a suffisamment de ressources dans sa petite tête pour en venir ou plutôt pour en revenir à la simplicité de la terre et de ses cultures.
Certains vont lever les bras au ciel en disant qu'on revient aux méthodes ancestrales mais pourquoi refuser d’utiliser de nouvelles méthodes(sic) si elles sont jugées également bonnes.Dans la philosophie de la permaculture il n’y a pas de rejet en bloc de la science et des connaissances rationnelles sur la nature, bien au contraire : on garde les choses anciennes qui fonctionnent.
La permaculture souhaite des individus actifs et responsables par opposition à un individu qui serait un consommateur passif et qui ne se soucierait pas d’une responsabilité qu’il a envers le monde, les autres, les générations futures et le plus grand changement qu’on peut attendre, on l’attend d’abord de soi-même : il s’agit de se transformer soi-même en transformant son mode de vie.(un vrai écolo,le père Sage,même si je ne suis pas un sectaire)
Bon , j'arrête là mes élucubrations car vous allez me traiter de dingue mais le potager est pour moi plus qu'une psychothérapie , nécessaire dans la période actuelle.
Je retourne à mes cartons !!!
Bises à toutes et à tous.