Je vais vous raconter une histoire.Vous savez certainement que je suis né pratiquement sur le Chemin des Dames,haut lieu de la guerre des tranchées de la guerre 14/18 qui me passionne.Cela fait donc un siècle que ces combats féroces,dans la boue,au milieu des rats,ont eu lieu.J'ai joué toute mon enfance dans les trous d'obus et même fait du motocross dans ces dédalles et quand j'y repense aujourd'hui,je mesure l'inconscience de la jeunesse.
Alors revenons à mon histoire:Début février 1915,Pierre Mestre est enrôlé dans un bataillon de chasseurs à pied.Il est envoyé pour dérouler des barbelés et est alors pris pour cible par les Allemands.Il se met à l'abri puis,au cours d'une accalmie essaie de rejoindre son régiment.En le recherchant,il croise sur le chemin deux officiers qui,le voyant seul,le soupçonnent d'être un déserteur.Il est alors traîné devant une cour martiale et il est fusillé sans attendre devant la troupe.
Cette histoire montre qu'à l'époque les jugements étaient expéditifs,sans procès,pour l'exemple,car la discipline doit régner à tout prix.En France 650 militaires ont été alors fusillés dont beaucoup qui s'étaient mutilés dans l'espoir de quitter les tranchées,ces tranchées de l'horreur.La Nouvelle Zélande et le Canada et les Anglais ont réhabilité ces soldats.Il faut faire la même chose en France.Bien sûr il n'est pas question de dire qu'il étaient des "héros" mais de dire qu'ils n'étaient pas des lâches.
Car personne n'a vocation à être un héros face à une mitrailleuse.La Ligue des Droits de l'Homme demande la réhabilitation de ces soldats.Les deux grands-pères de cet ancien médecin d'Angoulême sont tombés en 14/18.L'un à Verdun et il est devenu un héros,l'autre oublié par tous car il s'était mutilé et a été fusillé.
On a le droit d'avoir peur quand on est pendant des mois et même des années dans les tranchées avec pour seule espérance le fait de mourrir sans souffrance.Car beaucoup agonisaient sans soins et énormément ont été ensevelis sous la pluie de terre envoyée par les bombes.
Le général Bach,militaire à la retraite épluche actuellement les procès de l'époque et il faudra un jour en tirer les conclusions.J'écris cette chronique car j'ai entendu la famille de Pierre Mestre qui ne comprend pas que le papa soit traité comme un véritable paria alors qu'il a combattu mais qu'il a été injustement fusillé.La narration de ce fait d'armes de la guerre 14 m'a ému et,pour avoir parcouru le Chemin des Dames,pour avoir jouer dans la Caverne du Dragon,où les combats ,dans le noir,furent horribles,je m'autorise à m'interroger sur ces 650 poilus fusillés parce que les procès étaient tous à charge pour l'exemple,et surtout je m'interroge sur ma propre peur de la violence.
Dans les années 20 et les années 30,une cinquantaine de soldats ont été réhabilités,et depuis plus rien.
Réfléchissons-y !!
Le courage consiste à dominer sa peur,non pas à ne pas avoir peur.
«J'ai appris que le courage n'est pas l'absence de peur, mais la capacité de la vaincre.»
Nelson Mandela